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La pochette comme outil marketing
Si vous entrez chez un disquaire et que vous piochez un disque au hasard, il vous sera aisé de deviner de quel type de musique il s’agit et ce, même si l’artiste vous est inconnu. En effet, la pochette joue un rôle informatif auprès d’un potentiel consommateur. Ce dernier va y chercher les réponses à ses questions : À quel genre de musique ai-je affaire ? Quels types d’émotions vais-je ressentir en l’écoutant ? Pour quelle occasion est-elle destinée ?
Pour exercer ce rôle informatif, la pochette déploie des codes qui sont inconsciemment évocateurs. Par exemple, les motifs d’inspiration gothiques et celtiques sont souvent utilisés pour illustrer des pochettes de métal, tout comme les couleurs noire et rouge. Pour le reggae, les couleurs sont le vert, le jaune et leurs déclinaisons évoquant le drapeau jamaïcain, pays d’où il est historiquement originaire. Pour ce qui est du pop-rock, on notera l’utilisation régulière d’illustrations dans un style proche de celui de la BD ou du Pop art.
Au-delà d’une simple identification, nous pourrions même émettre l’hypothèse que ces codes influencent préalablement notre écoute. Mettez un album de musique classique dans une pochette de reggae, la personne qui l’écoutera sera surprise. En plus d’un rôle informatif, la pochette a donc un rôle préparatif important auprès du consommateur, en constituant une forme de vitrine de l’expérience musicale. Elle joue donc un rôle marketing notable.
Le story-telling : norme ou alternative ?
Prenez par exemple des stars telles que Madonna, Charles Aznavour ou encore Eminem. Aucun rapport a priori, si ce n’est le fait de prendre leur propre image pour illustrer leurs albums. Nous noterons que l’incarnation personnelle de la musique est plus courante dans certains genres que dans d’autres (pop, variété, rap) qui sont des genres se prêtant bien à une forme de story-telling, de mise en scène de soi. De plus, les artistes qui choisissent ce parti-pris sont suffisamment célèbres pour être reconnus, pour pouvoir être l’incarnation physique de leur propre musique. En effet, dans une logique marketing, il n’est intéressant de déployer cette technique que si l’artiste en tant que personnalité publique est aussi, voire plus, célèbre que sa musique (ce qui peut être le cas pour des personnalités ayant une grande couverture médiatique par exemple).
Cependant, de nombreuses pop-stars optent pour des pauses lascives, des couleurs glamours ou une lumière tamisée; quant aux rappeurs, ils arborent des accessoires de « bad boy » (tatouages, cicatrices, chaînes, couvre-chef), sur des fonds obscurs. S’il existe bien une singularité dans le fait d’auto-illustrer sa musique, elle est limitée; car, bien loin de bousculer les codes de leur genre, ces mises en scènes ne font finalement que s’approprier des codes établis.
La pochette est morte, vive la pochette !
Aujourd’hui, alors que 45% des consommateurs de musique utilisent des plateformes de streaming (source : IFPI), l’album comme entité physique nous semble quelque peu dépassé. Tout d’abord, il est important de nuancer ce phénomène, notons que près de 46% des consommateurs de musique écoutent encore des albums physiques, et 32% d’entre eux ont acheté des CDs au cours de l’année 2017 (source: IFPI). Bien que ce chiffre soit en baisse constante, il faut noter que les ventes de vinyles ont quant à eux doublées ces trois dernières années (source: SNEP). De plus, en dépit de la digitalisation, les pochettes sont encore utilisées sur les différentes plateformes pour illustrer les titres. Elles ne jouent certes plus le rôle de vitrine pour le consommateur, celui-ci étant davantage aiguillé par les recommandations algorithmiques ou attiré par la popularité d’un morceau (nombre de vues). Si sur le web la pochette se cantonne désormais à un simple rôle d’illustration, elle n’en demeure pas moins un enrichissement indispensable à l’expérience d’écoute. Physiquement ou digitalement, l’illustration musicale a encore de beaux jours devant elle.
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